Le 6 avril 2021, l’Université d’Oxford publie une étude réalisée sur 236 379 patients américains ayant contracté la COVID-19. Un lien existe entre l’infection virale et la santé mentale des patients.
Les séquelles au cerveau peuvent aussi survenir aux personnes qui développent une forme légère de COVID-19, il en est de même pour les personnes asymptomatiques, porteuses du SARS-CoV-2. L’étude révèle qu’un peu plus de 25% des patients admis aux soins intensifs, à la suite de l’infection virale, ont souffert de répercussions neurologiques ou psychiatriques pour la première fois de leur vie. Les séquelles se sont manifestées dans les 6 premiers mois de la maladie. De ce nombre admis aux soins intensifs, près de 3% ont subi un accident vasculaire cérébral (AVC), 2% ont souffert de démence, 13% de troubles de l’humeur, troubles anxieux, et même psychotiques. Le pourcentage de ces troubles psychiatriques grimpent au-delà des 25% lorsqu’on inclut les patients avec des conditions préexistantes. Le syndrome de Guillain-Barré, qui se manifeste par une perte des capacités motrices d’une partie du corps, fait aussi partie de la liste des séquelles laissées par la COVID-19. Il est avancé que le virus passe par le système nerveux central pour affecter le cerveau, mais davantage de recherches sont nécessaires pour en préciser la cause exacte.
Bien que présentes à 0,33% des cas, les conséquences neuropsychiatriques du syndrome de Guillain-Barré affectent un nombre considérable de gens à travers le monde. Pour donner un ordre de grandeur, au moment où ces lignes sont écrites, 138 252 104 cas de COVID-19 sont répertoriés dans le monde jusqu’à présent, selon le site de Radio-Canada. Cela voudrait dire que pas moins de 456 000 personnes pourraient en être touchées.
Les personnes les plus à risque d’être victime d’un AVC, de la démence, ou du délire, sont celles qui ont été hospitalisées aux soins intensifs. Compte tenu de la sévérité de la maladie, les formes bénignes peuvent tout de même causer de la dépression et des troubles anxieux. L’étude mentionne que ces conséquences sont bel et bien dues au coronavirus qui agit dans le cerveau, et non simplement un aléa qu’une personne malade peut ressentir.
Selon les auteurs de l’étude, le Docteur Maxime Taquet et ses collègues de l’Université d’Oxford : « L’association entre la COVID-19 et les diagnostics d’incidents cérébraux vasculaires et de neurodégénérescence, comme la démence, sont inquiétants. » Il est noté que les séquelles reliées à l’infection virale semblent largement répandues et pourraient persister au-delà de 6 mois. La maladie de Parkinson post-COVID-19 est aussi sur le radar des chercheurs. Toujours selon l’étude publiée dans la revue Lancet Psychiatry, ces données robustes demandent une attention particulière, malgré le manque d’information dans les dossiers de santé électronique consultés. Les informations liées au mode de vie ainsi que les facteurs socioéconomiques restent inconnus. Les séquelles neurologiques et psychiatriques de la COVID-19 sont sous-estimées, selon cette étude : « Il faut voir comment se porteront ceux qui ont subi la COVID-19, sans toutefois en avoir eu un diagnostic ou un suivi médical. »
Apprendre des expériences antérieures
Si l’infection de la COVID-19 suit un parcours similaire à ceux des MERS de 2002 (Moyen-Orient) et du SARS de 2012 (Chine), la plupart des patients devraient s’en sortir sans maladie mentale. Selon une étude psychiatrique de l’Université College London au Royaume-Uni, le délire est courant lorsque les patients sont aux soins intensifs. Pour ces coronavirus, s’en est suivi fréquemment le trouble de stress post-traumatique, la dépression, les troubles anxieux, et la fatigue chronique.
Les précédentes pandémies de grippe, comme celle de 1918, ont aussi entraîné des conséquences neuropsychiatriques à long terme. Plusieurs raisons font que la pandémie affecte la santé mentale des humains : l’isolement social, la distanciation physique, la mise en quarantaine, le stress chez les travailleurs essentiels, le chômage et les difficultés financières.
Comment se concrétise cette réalité ?
Michael Pinney, un kinésiologue dans la trentaine, contracte la COVID-19 en fin décembre 2020. Dès la deuxième semaine, des troubles anxieux se manifestent. Il n’a aucun autre symptôme physique. Son médecin lui prescrit des antidépresseurs. À la fin janvier, son état se détériore, et Michael fait une embolie pulmonaire. Il n’est jamais à bout de souffle, mais tousse et crache du sang. Michael est hospitalisé pendant 3 jours. En date d’aujourd’hui, le kinésiologue prend toujours des anticoagulants afin de dissoudre les caillots de ses poumons. Ses troubles anxieux perdurent jusqu’à présent et il mentionne : « l’anxiété m’a effectivement pris par surprise et je ne suis sûrement pas le seul ».
L’étude du Docteur Maxime Taquet et son équipe souligne que « la maladie est suivie de taux considérables de diagnostics neurologiques et psychiatriques et que la santé publique doit agir pour anticiper le besoin à venir. »